Carte de crédit : pourquoi les experts ne recommandent-ils pas de l’utiliser pour faire vos courses ?

L’usage d’une carte de crédit paraît d’une simplicité désarmante, mais cette facilité cache un mécanisme économique bien plus subtil. Ce mode de paiement pousse très souvent à la surconsommation.

De nombreuses études montrent en effet que les utilisateurs dépensent davantage avec une carte de crédit qu’avec de l’argent liquide. La raison tient en grande partie à la disparition de la « douleur de payer ».

Cette sensation qui accompagne la manipulation de billets et de pièces. Une analyse menée par des chercheurs australiens, regroupant 71 études et plus de 11 000 participants dans 17 pays, confirme que le paiement par carte entraîne une hausse des dépenses.

Le simple fait de ne pas voir physiquement son argent diminuer affaiblit la conscience de l’acte d’achat. À l’inverse, régler en espèces oblige à sortir son portefeuille, compter les billets, constater leur disparition.

Ce geste concret agit comme un frein psychologique : il oblige à réfléchir, à mesurer ce que l’on est prêt à sacrifier. L’économiste Richard Whittle, de la Salford Business School, souligne d’ailleurs que la carte de crédit « encourage les achats impulsifs et les dépenses superflues ».

Le liquide, lui, introduit une limite palpable qui aide à respecter son budget. Une étude parue en 2011 dans le Journal of Consumer Research montre que payer en espèces active les zones cérébrales associées à l’inconfort et à la perte.

Carte de crédit : servez-vous-en avec parcimonie

Toucher de l’argent réel déclenche une réaction émotionnelle qui renforce le contrôle des dépenses. Passer une carte, en revanche, rend l’opération abstraite et presque indolore.

L’économiste Stuart Mills, de l’Université de Leeds, résume ce phénomène comme « l’effacement du coût perçu ». Le liquide rend la dépense visible, la carte la fait disparaître.

Ce décalage favorise des achats plus fréquents, parfois inutiles, et complique la gestion du budget. S’y ajoute un autre effet : la carte de crédit permet de repousser le règlement de plusieurs jours ou semaines, ce qui créé l’illusion d’une marge financière plus confortable.

Les programmes de fidélité associés aux cartes jouent également un rôle. Dans de nombreuses enseignes, le paiement s’accompagne du scan d’une carte de fidélité. Ce qui permet aux distributeurs d’analyser les habitudes d’achat et de cibler leurs promotions.

Le consommateur devient alors plus réceptif aux incitations personnalisées, ce qui peut amplifier encore ses dépenses. Face à ces mécanismes psychologiques et économiques, des spécialistes recommandent de privilégier le liquide pour les achats du quotidien.

Payer en espèces permet de mieux sentir la valeur de l’argent, de limiter les impulsions et de reprendre le contrôle sur son budget. En réduisant l’usage systématique de la carte de crédit, on retrouve une relation plus consciente et plus saine avec ses dépenses.